Monde du travail

La discrimination raciale dans le monde du travail peut survenir à chaque étape: de l’offre d’emploi à caractère raciste au licenciement discriminatoire en passant par les discriminations au cours du recrutement , un contrat discriminatoire, des propos racistes et du harcèlement teinté de racisme durant les rapports de travail.

De nombreuses dispositions légales protègent contre la discrimination raciale dans le monde du travail. Les emplois dans les entreprises du secteur privé sont régis par le droit privé (Rapports de travail régis par le droit privé). La protection contre les discriminations au sens du droit du travail, prévue dans le code des obligations (CO) et le code civil (CC), revêt une importance particulière. Les emplois du secteur public (Confédération, cantons, communes et autres autorités administratives) relèvent en premier lieu du droit public (Rapports de travail régis par le droit public). Au contraire des employeurs du secteur privé, les employeurs de l’administration sont tenus de respecter les droits fondamentaux inscrits dans la Constitution fédérale (Cst.).

Explications

Rapports de travail régis par le droit public

La Confédération, les cantons, les communes et les entreprises de droit public comme les CFF ou la Poste ont leurs propres lois et ordonnances sur le personnel, des directives et des règlements sur la protection des données. Ces dispositions ne comportent pas d’interdiction claire de la discrimination raciale, mais contiennent généralement des explications concernant la protection contre les atteintes à la personnalité ainsi que des clauses portant sur le licenciement abusif. Les lois sur le personnel renvoient aussi souvent aux dispositions du droit privé (cf. art. 328 et art. 336 CO).

Explications

Art. 336 CO: fin des rapports de travail / protection contre les congés / résiliation abusive / principe

1 Le congé est abusif lorsqu’il est donné par une partie:
a. pour une raison inhérente à la personnalité de l’autre partie, à moins que cette raison n’ait un lien avec le rapport de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l’entreprise;
b. en raison de l’exercice par l’autre partie d’un droit constitutionnel, à moins que l’exercice de ce droit ne viole une obligation résultant du contrat de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l’entreprise;
c. parce que l’autre partie fait valoir de bonne foi des prétentions résultant du contrat de travail;
d. seulement afin d’empêcher la naissance de prétentions juridiques de l’autre partie, résultant du contrat de travail;
e. parce que l’autre partie accomplit un service obligatoire, militaire ou dans la protection civile, ou un service civil, en vertu de la législation fédérale, ou parce qu’elle accomplit une obligation légale lui incombant sans qu’elle ait demandé de l’assumer.
2 Est également abusif le congé donné par l’employeur:
a. en raison de l’appartenance ou de la non-appartenance du travailleur à une organisation de travailleurs ou en raison de l’exercice conforme au droit d’une activité syndicale;
b. pendant que le travailleur, représentant élu des travailleurs, est membre d’une commission d’entreprise ou d’une institution liée à l’entreprise et que l’employeur ne peut prouver qu’il avait un motif justifié de résiliation.
c. sans respecter la procédure de consultation prévue pour les licenciements collectifs (art. 335f).
3 Dans les cas prévus à l’al. 2, let. b, la protection du représentant des travailleurs dont le mandat a pris fin en raison d’un transfert des rapports de travail (art. 333) est maintenue jusqu’au moment où ce mandat aurait expiré si le transfert n’avait pas eu lieu

Commentaire:

En principe, la liberté de résilier un contrat de travail est garantie. Cependant, l’art. 336 CO mentionne des cas où une résiliation est abusive. D’après la doctrine majoritaire et la jurisprudence en la matière, cette liste n’est pas exhaustive. Il s’agit dès lors d’examiner au cas par cas si la résiliation est abusive ou non.

Dans les cas de discrimination raciale, c’est surtout l’al. 1, let. a, b et d, qui entre en ligne de compte. Conformément à l’al. 1, let. a, le congé est abusif lorsqu’il est donné pour une raison inhérente à la personnalité de la personne licenciée (p. ex. traits physiques, appartenance à une religion, nationalité, etc.). Toutefois, le congé n’est pas abusif lorsque la caractéristique en question nuit gravement au climat de travail et que l’employeur a entrepris toutes les démarches qu’on pouvait raisonnablement attendre de lui pour améliorer la situation.
Un congé est abusif au sens de l’al. 1, let. b, lorsqu’une personne est licenciée pour avoir exercé un droit garanti par la Constitution, comme la liberté de croyance (art. 15 Cst.) ou la liberté d’opinion (art. 16 Cst.). Ainsi, lorsqu’une femme de confession musulmane est licenciée au motif qu’elle porte le voile, le congé est en principe abusif. Cependant, tel n’est pas le cas si l’exercice de ce droit nuit gravement au climat de travail ou contrevient à un devoir professionnel de l’employé.
Le congé est aussi considéré comme abusif lorsque la personne a été licenciée alors qu’elle cherchait à faire valoir des prétentions résultant du contrat de travail (al. 1, let. d, licenciement de rétorsion). Par exemple, lorsqu’une personne se défend contre des actes à caractère raciste ou lorsqu’elle demande à son employeur de prendre des mesures de protection contre un harcèlement à caractère raciste.

Un licenciement abusif n’est jamais réversible; il donne droit uniquement à une indemnité. Conformément à l’art. 336a, al. 2, CO, l’indemnité ne peut dépasser le montant correspondant à six mois de salaire du travailleur. Dans le cadre d’un licenciement collectif (art. 336, al. 2, let. c, CO), elle est limitée à un maximum de deux mois de salaire.

À noter qu’un congé peut à la fois être abusif et ne pas respecter le délai de résiliation (art. 336c CO). Les conséquences juridiques d’une telle situation doivent être évaluées au cas par cas (nullité ou validité du licenciement). Par ailleurs, un licenciement abusif peut déjà se produire durant le temps d’essai.

Lorsque les lois sur le personnel n’offrent pas de protection suffisante, ce sont les interdictions de discrimination inscrites dans la Constitution ou le droit international qui s’appliquent (cf. art. 8, al. 2, Cst.). Elles revêtent de l’importance notamment en amont de l’embauche, en cas de refus d’engagement à caractère discriminatoire ou de contrat contenant des clauses discriminatoires, mais aussi en cas de discrimination dans le cadre des rapports de travail. Le principe de la bonne foi inscrit dans la Constitution oblige l’employeur à se comporter correctement, de manière non discriminatoire, envers les employés (art. 5, al. 3, Cst.). Les institutions assumant des tâches publiques sont en outre directement tenues de respecter les droits fondamentaux (p. ex. liberté de croyance, art. 15 Cst., protection de la sphère privée, art. 13 Cst., ou liberté de la langue, art. 18 Cst.).

Explications

Art. 8 Cst.: égalité devant la loi

1 Tous les êtres humains sont égaux devant la loi.
2 Nul ne doit subir de discrimination du fait notamment de son origine, de sa race, de son sexe, de son âge, de sa langue, de sa situation sociale, de son mode de vie, de ses convictions religieuses, philosophiques ou politiques ni du fait d’une déficience corporelle, mentale ou psychique.

3 L’homme et la femme sont égaux en droit. La loi pourvoit à l’égalité de droit et de fait, en particulier dans les domaines de la famille, de la formation et du travail. L’homme et la femme ont droit à un salaire égal pour un travail de valeur égale.
4 La loi prévoit des mesures en vue d’éliminer les inégalités qui frappent les personnes handicapées.

Commentaire:

En matière de lutte contre la discrimination raciale, le principe général de l’égalité en droit (al. 1) et l’interdiction générale de discriminer (al. 2) revêtent une importance particulière. Ils représentent des droits constitutionnels dont toute personne physique (particuliers) peut se prévaloir, indépendamment de sa nationalité. Les personnes morales (sociétés de capitaux, associations, fondations, etc.) peuvent aussi se prévaloir du principe d’égalité fixé à l’al. 1.

L’art. 8 Cst. s’applique à tous les échelons de l’État (Confédération, cantons, communes et autres organes de l’administration), aussi bien dans la phase d’élaboration du droit que dans son application. À noter toutefois que cette disposition ne lie en principe que l’État et qu’elle n’est donc applicable que de manière très restreinte aux relations entre particuliers.

Le principe d’égalité de l’al. 1 n’est pas absolu. Il arrive qu’une inégalité de traitement soit justifiée par des raisons objectives: elle est dans ce cas licite, voire obligatoire. Par exemple, les prestations de l’aide sociale varient en fonction du statut de séjour d’un individu.

L’interdiction de discriminer fixée à l’al. 2 représente une application particulière du principe d’égalité et constitue en quelque sorte l’essence de l’art. 8 Cst. Toute inégalité de traitement fondée sur l’une des caractéristiques mentionnées à cet alinéa est illicite, à moins qu’elle repose sur une justification dite qualifiée, c’est-à-dire qu’elle est proportionnée au but visé et justifiée par un intérêt public (par analogie à l’art. 36 Cst.). L’interdiction de discriminer s’applique indépendamment de l’intentionnalité de l’acte et frappe les discriminations aussi bien ABSATZ19directes qu’ABSATZ20indirectes.

La liste des caractéristiques mentionnées à l’al. 2 n’est pas exhaustive. Par origine, on entend la provenance géographique ou l’appartenance ethnique, nationale ou culturelle qui constitue l’identité d’une personne. Les inégalités fondées sur la nationalité relèvent en premier lieu de l’al. 1. Devenu aujourd’hui obsolète en Europe, le terme de race renvoie quant à lui à des caractéristiques telles que la couleur de peau ou l’ascendance. Enfin, les droits liés à la langue et aux convictions sont réglés plus spécifiquement dans d’autres dispositions (liberté de la langue, art. 18 Cst., liberté de conscience et de croyance, art. 15 Cst., libertés d’opinion et d’information, art. 16 Cst.).

Les propos et la violence à caractère raciste sont contraires au principe de la protection de la personnalité au sens du droit du travail. La personne qui s’estime discriminée peut recourir à une procédure civile à certaines conditions ou faire valoir la réglementation sur la responsabilité de l’État.

Se conduire de manière raciste en présence de personnes avec lesquelles on n’a pas de lien personnel est punissable d’une amende ou d’une peine d’emprisonnement, en fonction de la gravité des faits (art. 261bis CP). D’autres dispositions pénales peuvent s’appliquer (p. ex. art. 177 CP, injure; art. 122 ss CP, lésions corporelles; art. 180 CP, menaces; etc.).

Explications

Art 261bis CP: discrimination raciale

1 Quiconque, publiquement, incite à la haine ou à la discrimination envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse ou de leur orientation sexuelle;
2 quiconque, publiquement, propage une idéologie visant à rabaisser ou à dénigrer de façon systématique cette personne ou ce groupe de personnes;
3 quiconque, dans le même dessein, organise ou encourage des actions de propagande ou y prend part;
4 quiconque publiquement, par la parole, l’écriture, l’image, le geste, par des voies de fait ou de toute autre manière, abaisse ou discrimine d’une façon qui porte atteinte à la dignité humaine une personne ou un groupe de personnes en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse ou de leur orientation sexuelle ou qui, pour la même raison, nie, minimise grossièrement ou cherche à justifier un génocide ou d’autres crimes contre l’humanité;
5 quiconque refuse à une personne ou à un groupe de personnes, en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse ou de leur orientation sexuelle, une prestation destinée à l’usage public,
6 est puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.

Commentaire:

Les al. 1 à 3 de cette disposition portent sur différentes formes de discours de haine adressés publiquement (appel à la haine ou diffusion d’idéologies racistes). À l’inverse, les al. 4 et 5 visent des discriminations directes à l’encontre d’une personne ou d’un groupe de personnes.

L’art 261bis CP protège en premier lieu la dignité humaine (art. 7 Cst.). Ainsi, cette disposition cherche à préserver la paix publique, qui vise à garantir la coexistence pacifique et la sécurité de la population. Il y a atteinte à la dignité humaine dès lors que les caractéristiques essentielles de la personnalité d’un individu ou d’un groupe d’individus sont touchées, c’est-à-dire lorsqu’ils sont présentés comme des êtres inférieurs et que leur qualité d’être humain ou leur droit à la vie leur sont niés. Les faits reprochés doivent donc revêtir une certaine gravité.

L’art. 261bis CP sanctionne uniquement les discriminations liées à la ABSATZ13race, à l’ethnie, à la religion ou à l'orientation sexuelle, mais pas à l’appartenance nationale ni à la citoyenneté.

En outre, seuls les actes publics sont sanctionnés. Selon le Tribunal fédéral, les actes ou les propos qui revêtent un caractère public au sens de l’article 261bis CP sont ceux qui n’ont pas lieu dans un cadre privé, c’est-à-dire ceux qui ne sont exprimés ni dans le cercle familial ou d’amis ni dans un environnement de relations personnelles ou empreint d’une confiance particulière. L’analyse des circonstances concrètes permet de déterminer au cas par cas si cette condition est remplie. Le nombre de personnes présentes peut aussi jouer un rôle, sans pour autant être déterminant à lui tout seul. (ATF 130 IV 111, p. 119 s., consid. 5.2.2). D’après le Tribunal fédéral, la possibilité concrète que des tiers aient pu constater l’acte suffit déjà à remplir cette condition (ATF 133 IV 308, p. 319, consid. 9.1). Si cette condition fait défaut, les actes incriminés peuvent constituer d’autres infractions, comme l’injure (art. 177 CP) ou les lésions corporelles (art. 122 ss CP).

Explications

Rapports de travail régis par le droit privé

Les rapports de travail régis par le droit privé sont soumis à des règles moins strictes que ceux régis par le droit public, car c’est le principe de la liberté de contracter qui s’y applique. Les dispositions générales du droit des obligations posent néanmoins des limites à la liberté de contracter. L’employeur est tenu, en vertu du devoir de protection du travailleur, de protéger ses employés contre les propos discriminatoires à caractère raciste (art. 328 CO). La protection contre le licenciement protège l’employé d’un licenciement abusif, fondé par exemple sur des critères liés à la religion, la couleur de peau ou l’origine régionale (art. 336 CO). La protection de la personnalité au sens du droit civil permet de se défendre contre la violence et les propos racistes (art. 28 CC). Il est en outre possible de l’invoquer en cas de refus d’embauche discriminatoire.

Explications

Art . 28 CC: protection de la personnalité / contre des atteintes / principe

1 Celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité peut agir en justice pour sa protection contre toute personne qui y participe.
2 Une atteinte est illicite, à moins qu’elle ne soit justifiée par le consentement de la victime, par un intérêt prépondérant privé ou public, ou par la loi.

Commentaire:

L’art. 28 CC protège les personnes physiques et morales contre les propos et les actes de tiers qui portent atteinte à leur personnalité. Au sens juridique du terme, la personnalité comprend l’ensemble des valeurs fondamentales d’une personne. Cette disposition protège aussi bien l’existence que la personnalité propre à chaque individu.

Les atteintes peuvent porter sur la personnalité physique, émotionnelle, psychique, économique ou sociale (p. ex. sphère privée ou autodétermination informationnelle), ainsi que sur l’honneur.

Pour invoquer une atteinte à la personnalité au sens de l’art. 28 CC, le fait reproché doit revêtir une certaine gravité. L’atteinte doit par ailleurs être contraire au droit (c’est-à-dire non justifiée). Le consentement de la victime ou un intérêt prépondérant public ou privé (p. ex. intérêt à l’information du public) constituent des exemples de justifications valables. Dans un premier temps, il s’agit donc de vérifier s’il y a effectivement une atteinte à la personnalité au sens juridique du terme et, le cas échéant, si des motifs peuvent justifier cette atteinte. Par ailleurs, la faute ne doit pas forcément être intentionnelle.

Seules les personnes qui ont directement subi une atteinte à leur personnalité disposent de la qualité pour agir. Elles peuvent demander au juge d’interdire, de faire cesser ou de constater l’atteinte (art. 28a, al. 1, ch. 1 à 3, CC). Elles peuvent aussi demander la publication d’une rectification des propos discriminatoires ou, le cas échéant, du jugement condamnant l’auteur. Dans la mesure du possible, cette publication doit atteindre le même public que celui qui a eu connaissance des faits incriminés. Lorsque l’atteinte à la personnalité se fait par le biais des médias, la victime peut bénéficier d’un droit de réponse (art. 28g CC).

L’art. 328 CO règle les cas spécifiques à la protection de la personnalité des travailleurs.

Informations complémentaires sur l’atteinte à l’honneur (en allemand).

Explications

Art. 336 CO: fin des rapports de travail / protection contre les congés / résiliation abusive / principe

1 Le congé est abusif lorsqu’il est donné par une partie:
a. pour une raison inhérente à la personnalité de l’autre partie, à moins que cette raison n’ait un lien avec le rapport de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l’entreprise;
b. en raison de l’exercice par l’autre partie d’un droit constitutionnel, à moins que l’exercice de ce droit ne viole une obligation résultant du contrat de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l’entreprise;
c. parce que l’autre partie fait valoir de bonne foi des prétentions résultant du contrat de travail;
d. seulement afin d’empêcher la naissance de prétentions juridiques de l’autre partie, résultant du contrat de travail;
e. parce que l’autre partie accomplit un service obligatoire, militaire ou dans la protection civile, ou un service civil, en vertu de la législation fédérale, ou parce qu’elle accomplit une obligation légale lui incombant sans qu’elle ait demandé de l’assumer.
2 Est également abusif le congé donné par l’employeur:
a. en raison de l’appartenance ou de la non-appartenance du travailleur à une organisation de travailleurs ou en raison de l’exercice conforme au droit d’une activité syndicale;
b. pendant que le travailleur, représentant élu des travailleurs, est membre d’une commission d’entreprise ou d’une institution liée à l’entreprise et que l’employeur ne peut prouver qu’il avait un motif justifié de résiliation.
c. sans respecter la procédure de consultation prévue pour les licenciements collectifs (art. 335f).
3 Dans les cas prévus à l’al. 2, let. b, la protection du représentant des travailleurs dont le mandat a pris fin en raison d’un transfert des rapports de travail (art. 333) est maintenue jusqu’au moment où ce mandat aurait expiré si le transfert n’avait pas eu lieu

Commentaire:

En principe, la liberté de résilier un contrat de travail est garantie. Cependant, l’art. 336 CO mentionne des cas où une résiliation est abusive. D’après la doctrine majoritaire et la jurisprudence en la matière, cette liste n’est pas exhaustive. Il s’agit dès lors d’examiner au cas par cas si la résiliation est abusive ou non.

Dans les cas de discrimination raciale, c’est surtout l’al. 1, let. a, b et d, qui entre en ligne de compte. Conformément à l’al. 1, let. a, le congé est abusif lorsqu’il est donné pour une raison inhérente à la personnalité de la personne licenciée (p. ex. traits physiques, appartenance à une religion, nationalité, etc.). Toutefois, le congé n’est pas abusif lorsque la caractéristique en question nuit gravement au climat de travail et que l’employeur a entrepris toutes les démarches qu’on pouvait raisonnablement attendre de lui pour améliorer la situation.
Un congé est abusif au sens de l’al. 1, let. b, lorsqu’une personne est licenciée pour avoir exercé un droit garanti par la Constitution, comme la liberté de croyance (art. 15 Cst.) ou la liberté d’opinion (art. 16 Cst.). Ainsi, lorsqu’une femme de confession musulmane est licenciée au motif qu’elle porte le voile, le congé est en principe abusif. Cependant, tel n’est pas le cas si l’exercice de ce droit nuit gravement au climat de travail ou contrevient à un devoir professionnel de l’employé.
Le congé est aussi considéré comme abusif lorsque la personne a été licenciée alors qu’elle cherchait à faire valoir des prétentions résultant du contrat de travail (al. 1, let. d, licenciement de rétorsion). Par exemple, lorsqu’une personne se défend contre des actes à caractère raciste ou lorsqu’elle demande à son employeur de prendre des mesures de protection contre un harcèlement à caractère raciste.

Un licenciement abusif n’est jamais réversible; il donne droit uniquement à une indemnité. Conformément à l’art. 336a, al. 2, CO, l’indemnité ne peut dépasser le montant correspondant à six mois de salaire du travailleur. Dans le cadre d’un licenciement collectif (art. 336, al. 2, let. c, CO), elle est limitée à un maximum de deux mois de salaire.

À noter qu’un congé peut à la fois être abusif et ne pas respecter le délai de résiliation (art. 336c CO). Les conséquences juridiques d’une telle situation doivent être évaluées au cas par cas (nullité ou validité du licenciement). Par ailleurs, un licenciement abusif peut déjà se produire durant le temps d’essai.

Se conduire de manière raciste en présence de personnes avec lesquelles on n’a pas de lien personnel est punissable d’une amende ou d’une peine d’emprisonnement, en fonction de la gravité des faits (art. 261bis CP). D’autres dispositions pénales peuvent s’appliquer (p. ex. art. 177 CP, injure; art. 122 ss CP, lésions corporelles; art. 180 CP, menaces; etc.).

Explications

Art 261bis CP: discrimination raciale

1 Quiconque, publiquement, incite à la haine ou à la discrimination envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse ou de leur orientation sexuelle;
2 quiconque, publiquement, propage une idéologie visant à rabaisser ou à dénigrer de façon systématique cette personne ou ce groupe de personnes;
3 quiconque, dans le même dessein, organise ou encourage des actions de propagande ou y prend part;
4 quiconque publiquement, par la parole, l’écriture, l’image, le geste, par des voies de fait ou de toute autre manière, abaisse ou discrimine d’une façon qui porte atteinte à la dignité humaine une personne ou un groupe de personnes en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse ou de leur orientation sexuelle ou qui, pour la même raison, nie, minimise grossièrement ou cherche à justifier un génocide ou d’autres crimes contre l’humanité;
5 quiconque refuse à une personne ou à un groupe de personnes, en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse ou de leur orientation sexuelle, une prestation destinée à l’usage public,
6 est puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.

Commentaire:

Les al. 1 à 3 de cette disposition portent sur différentes formes de discours de haine adressés publiquement (appel à la haine ou diffusion d’idéologies racistes). À l’inverse, les al. 4 et 5 visent des discriminations directes à l’encontre d’une personne ou d’un groupe de personnes.

L’art 261bis CP protège en premier lieu la dignité humaine (art. 7 Cst.). Ainsi, cette disposition cherche à préserver la paix publique, qui vise à garantir la coexistence pacifique et la sécurité de la population. Il y a atteinte à la dignité humaine dès lors que les caractéristiques essentielles de la personnalité d’un individu ou d’un groupe d’individus sont touchées, c’est-à-dire lorsqu’ils sont présentés comme des êtres inférieurs et que leur qualité d’être humain ou leur droit à la vie leur sont niés. Les faits reprochés doivent donc revêtir une certaine gravité.

L’art. 261bis CP sanctionne uniquement les discriminations liées à la ABSATZ13race, à l’ethnie, à la religion ou à l'orientation sexuelle, mais pas à l’appartenance nationale ni à la citoyenneté.

En outre, seuls les actes publics sont sanctionnés. Selon le Tribunal fédéral, les actes ou les propos qui revêtent un caractère public au sens de l’article 261bis CP sont ceux qui n’ont pas lieu dans un cadre privé, c’est-à-dire ceux qui ne sont exprimés ni dans le cercle familial ou d’amis ni dans un environnement de relations personnelles ou empreint d’une confiance particulière. L’analyse des circonstances concrètes permet de déterminer au cas par cas si cette condition est remplie. Le nombre de personnes présentes peut aussi jouer un rôle, sans pour autant être déterminant à lui tout seul. (ATF 130 IV 111, p. 119 s., consid. 5.2.2). D’après le Tribunal fédéral, la possibilité concrète que des tiers aient pu constater l’acte suffit déjà à remplir cette condition (ATF 133 IV 308, p. 319, consid. 9.1). Si cette condition fait défaut, les actes incriminés peuvent constituer d’autres infractions, comme l’injure (art. 177 CP) ou les lésions corporelles (art. 122 ss CP).

Les dispositions de l’accord sur la libre circulation des personnes entre la Suisse et l’UE (ALCP) s’appliquent aux rapports de travail en relation avec l’UE/AELE, qu’ils soient régis par le droit public ou par le droit privé.

Principaux cas de figure